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TRANS_HUMAN_ART

Un projet en cours de création de Mickaël Sabbah

En résidence de création au Théâtre du Temps

Histoire de TRANS_HUMAN_ART

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GENÈSE

Une collaboration, Privé, avec le musicien Planetaldol, amène Mickaël Sabbah à étudier La Divine Comédie de Dante Alighieri pour proposer Trans_Human_Art. Il s’agit d’un triptyque composé de 22 épisodes dramatiques organisés en trois saisons nommées comme des fréquences radios existant sur les instruments de musique électronique employés.

 

La première, GN. (6.66) fait référence à l’Enfer aussi appelé Géhenne dans les cultures grecques et juives et dont l’héritage peut aussi être retrouvé dans le monde musulman, pour désigner une purification par une souffrance intolérable, au chiffre du diable. La deuxième, XP (6.77) rappelle les mots “expérimentations” liées au monde médical, et “expiation” en lien avec le Purgatoire. Enfin, EDN (7.77) correspond au Paradis ou à l’Eden biblique et use de la symbolique sacrée du chiffre 7 et de la trinité.

 

A l’instar de ces fréquences, le chiffre 22 doit être vu comme une métaphore filée au long de la pièce : signifiant la naissance de l’Univers ou l’Odyssée, il est présent aux moments clés de l’œuvre et dans sa structure même.

 

Trans_Human_Art utilise un format n’appartenant pas au théâtre mais bien plus aux séries : chaque soir, le spectateur assiste à un épisode unique de l’une de ces saisons. Cela permet à la Cie Anànkë d’interroger la tradition théâtrale de la répétition d’un même texte à l’époque de la retransmission permanente du réel tout en s’inscrivant dans l’esthétique contemporaine de la série.

Au-delà de la simple visée artistique, Trans_Human_Art se destine à un objectif plus spécifique. Dans un premier temps, la création traduit la méthode dite « thérapie de la reconsolidation » mise en place par le professeur Alain Brunet et qui tend à permettre aux victimes de stress post traumatique et notamment celles ayant subi des attentats terroristes de sortir de leurs troubles. Dans un second temps, elle propose de le prolonger. Il s’agit pour Mickaël Sabbah de remonter aux origines même de la violence de l’Homme sur l’Homme

 

La démarche de l’Art comme remède n’est pas nouvelle et a déjà été mobilisée dans d’autres formes artistiques. L’Art a déjà interrogé l’individu confronté à un trauma. Ainsi le groupe de recherche multidisciplinaire Forensic Architecture, basé au Center for Research Architecture de l'Université de Londres Goldsmiths, utilise l’Art et notamment les techniques et technologies architecturales pour enquêter sur les violences d’Etat et les violations des droits de l’Homme dans le monde. 

 

Preuve a donc déjà été faite que l’Art et l’Artistique peuvent réparer l’individu abimé. Dans son livre « l’Art qui guérit » le neurologue Pierre Lemarquis notait ainsi qu’« une œuvre d’art s’adresse aux deux facultés de notre cerveau (…) Elle le sculpte en lui faisant découvrir ce qu’il ne connaît pas. Elle le caresse en lui procurant plaisir et récompense. » Le projet Trans_Human_Art entre aussi dans cette approche innovante qui se veut être en accord avec l’évolution de la société.

Un projet médical peut être donc l’architecture d’un projet artistique.  Ce dernier peut toucher un public d’autant plus large, que bon nombre d’entre nous vivent en ce moment-même le trauma d’un confinement, d’une pandémie, d’attaques terroristes et de violences sociales.

SYNOPSIS

Le 21 juin 2022, à 14h22, dans une maison de banlieue, un couple se dispute violemment. Des cris retentissent. La femme, hors d’elle, déchire les poèmes d’amour que l’homme lui a offert et les jettent dehors. L’homme part errer dans la ville. Des malfaiteurs le repèrent et le leurrent. À la tombée de la nuit, ils l’attirent dans la Cité Dolente, le dévalisent et le rouent de coups de la tête aux pieds. Une flaque de sang se répand lentement dans le noir. 22h, une femme décide d’appeler les secours. 22h22, la police arrive et l’observe agoniser. Enfin, les pompiers viennent à son secours. Plongé dans un coma artificiel, il est transporté en salle de réanimation. Le 22 juin 2022, à 2h22, son cœur électrochoqué doit répondre à l’ultime question : qui de la mort ou de l’amour est le plus fort ?

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PERSONNAGES

MISHÀ

LE REVENANT

Protagoniste principal, il connaît une rupture amoureuse et voit ses poèmes déchirés,  il est rabattu, à la tombée de la nuit, aux abords de la Cité dolente. Il est alors agressé par une bande organisée sous le prétexte de lui racketter son téléphone, et est hospitalisé. La pièce relate sa traversée pour retrouver la santé et sa vie. Il est interprété par Mickaël Sabbah qui est seul en scène par intermittence. Son costume se compose d’un jean troué, d’une lampe frontale, de tennis blanches qui brillent dans la lumière noire et lui ont permis d’être repéré dans la nuit. Ces vêtements étaient portés durant l’agression et sont remis au personnage à sa sortie de l’hôpital partiellement tachés de sang avec une pièce d’un euro. Il garde le téléphone litigieux avec lui sur scène. Le costume évolue au fur et à mesure de la pièce (des masques dont ceux de type demi-gaz, sont par exemple introduits).

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HANT

LE POSSÉDÉ

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Acolyte du Revenant Mishà, ce biologiste expert dans l’industrie pharmaceutique, est passionné par la médecine légale et la musique (qu’il pratique par ailleurs). Atteint par une paranoïa pathologique, il est persuadé que Mishà Le Revenant lui vole son identité et lui a dérobé le protocole expérimental. Le personnage sombre peu à peu dans la folie.

Il est présent durant la traversée de l’Enfer et apparaît momentanément pendant le voyage dans le Purgatoire.

Il est interprété par Planetaldol dans la bande sonore. Sa présence et son souvenir sont matérialisés sur scène par un autre biais, notamment un hologramme , des objets (marionnettes, bâtons) ou des interventions d’autres interprètes.

SIGNIFICATION

Trans-Human Art (THA) aborde la violence antédiluvienne de l’humanité, le post-traumatisme et le long cheminement vers la guérison de soi. L’histoire débute par un fait divers - l'agression d’un homme en pleine rue par une bande organisée - menant à une enquête judiciaire, à travers laquelle le narrateur cherche à remonter à la source du mal, pour le comprendre et le démystifier, afin de se reconstruire intérieurement. 

La renaissance du protagoniste s'opère par la réappropriation de son corps. Souffrant d’un stress post-traumatique dévorant suite au coma prolongé et à l’expérience de mort imminente qu’il a vécu après son agression, notre héros se bat pour sa santé physique et mentale à l’instar de Dante dans La Divine Comédie, qui navigue dans le Monde des Morts pour rejoindre sa bien-aimée. 

Durant sa convalescence, le protagoniste cherche à comprendre son agression et la cause de sa douleur, quitte à plonger au cœur de souvenirs enfouis. Cette introspection le mène peu à peu vers la guérison: petit à petit, il parvient à percevoir la voix de la chirurgienne postée au-dessus de son lit, le chant des oiseaux et le son de la machinerie de sa chambre. Il se remémore son odyssée et les mots de ses poèmes déchirés. Cette résonance nouvelle l’arrachera de la mort.

Le projet comporte également une dimension thérapeutique, analysant le fonctionnement aliénant du système médico-légal et la difficulté à obtenir justice. Au cours de l’enquête, la scène devient une alternative, un lieu où l’on peut se réapproprier son histoire personnelle et entrevoir l’espoir d’une rémission, par une invitation à libérer sa parole. THA interroge l'existence même de ces événements traumatiques parfois niés par la société. Il revient au spectateur de se faire une opinion sur la véracité des faits relatés et de les juger.

MISE EN SCÈNE

MATIÈRE SONORE

Trans_Human_Art déploie une matière sonore à partir d’éléments concrets, réalisée en duo avec Planetaldol puis uniquement par Mickaël Sabbah. À partir d’une table de mixage reliée à des Kaoss pad 2 et 3, différentes sources sonores sont injectées à un fond musical comme des field recordings via des lecteurs numériques ou analogiques, des voix et/ou des objets via des microphones. La démarche de création musicale est principalement acousmatique, c’est à-dire qu’elle ne repose pas sur l’utilisation de sources musicales « classiques » telles que des instruments de musique. Le refus de sources mélodiques permet de s’affranchir de toute norme ou repère chez l’auditeur comme chez l’artiste, ce qui crée un environnement sonore singulier et libre. La musique retrouve alors son sens originel d’onde (vibration, om), ce qui renforce l’impact émotionnel sur l'auditeur et le plonge dans un univers purement sensitif et primordial.

 

Différents instruments sont mobilisés pour donner vie à cette facette sonore de la pièce mais le matériel utilisé est volontairement petit, portable et léger. Il laisse place à l’expression scénique et à l’association d’éléments simples pour former un ensemble cohérent et surprenant. Tout tient dans une mallette à couteaux bleue et une valise de type Flycase.

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Le Kaossilator 2 est utilisée pour programmer et superposer des sons et des rythmes et les moduler en fonction des autres éléments du set. Petit et sans synchronisation, il permet de créer une matière sonore en direct et par les mouvements du corps, voire de la danse.

Le Kaoss Pad 3 effectue en temps réel des captations prélevées à travers la table de mixage, des dictaphones, du Kaossilator 2, ou encore des micros. Les sons capturés sont alors modulés via des délais et des effets afin d’enrichir, d'approfondir et de complexifier les sons originaux. Il est aussi doté de quelques rythmes puissants et est en quelque sorte le cœur de la configuration.
Le nom des saisons GN (6.66), XP (6.77) et EDN (7.77) s’inspirent directement des fréquences de cet outil.

Le dictaphone Olympus plus ancien, est utilisé ponctuellement pour superposer ou répondre rapidement aux autres dictaphones par des enregistrements des pièces passées, des passages de textes scientifiques, juridiques ou médicaux et pour jouer avec ses touches aux sonorités spécifiques.

Le dictaphone Olympus Imaging est employé pour lancer rapidement des prises de sons concrets, (dialogues, bruits de machines, bruits de la nature, chants humains, samples de vinyles, enregistrements capturés à des moments opportuns, … et toutes sortes de séquences volées à la vie) retravaillées par l’ingénieur son pour une meilleur intelligibilité et une plus grande homogénéisation du spectre sonore et de la dynamique de volume.

Les lecteurs numériques Roland Edirol R09, première et deuxième générations, sont utilisés pour balancer des nappes de sons et des field recordings.
Comme pour les dictaphones, chaque lecteur  a son empreinte sonore spécifique.

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La table de mixage Behringer permet des entrées et sorties auxiliaires, utilisées pour nourrir le Kaoss Pad 3 des tranches précédemment citées en réinjectant les sons modulés dans la table, et en les diffusant donc en temps réel, parallèlement aux sources d’origine. 

Les instruments acoustiques et objets sonores métalliques pour enfant produisant chacune des sonorités différentes. Ces instruments et objets sont soit amplifiés par des micros contact, samplés et retravaillés par le Kaoss pad, soit utilisés en acoustique. 

Le téléphone portable de l’acteur-auteur est laissé allumé pendant qu'il joue. Il laisse les gens l’appeler, pour dialoguer, et pour jouer avec les textures sonores, les ondes électromagnétiques et les larsens que ces objets-prothèses peuvent produire. Les spectateurs ont, eux aussi, le droit de laisser leurs téléphones portables allumés afin de jouer ici avec les conversations numériques, les ondes satellitaires et les mondes  parallèles.

À ces sons s’ajoute la lecture pré-enregistrée de textes par Mickaël Sabbah. Le point de départ de cette collaboration en duo avec Planetaldol est l’utilisation de la voix comme source sonore pure pour faire jaillir d’autres significations du support primaire que constitue le texte lu. Cet organe devient alors une sorte de reflet déformé qui enrichit et métamorphose la matière première, et est amené à être modifié à l’aide d’effets en direct afin d'accentuer le contenu textuel. Les samples fragmentent le texte et créent des motifs-mots-phrases clefs qui permettent, par les jeux du hasard, dépendant de la durée du sampling, de créer des nouveaux mots-sens (phonèmes, monèmes) ainsi que des néologismes. 

MATIÈRE TEXTUELLE

Dans cette création, diverses sources textuelles s’entrecroisent au point de ne plus être distinguées les unes des autres, créant une transtextualité nouvelle. 

Tout d’abord, les écrits antérieurs de Mickaël Sabbah prennent un sens prophétique à l’aune du drame. Les trois poèmes d'amour déchirés, Edelweiss, L’horloge du Temps et Oiseaux Pic Pic, points de départ de l’histoire, font l’objet d’une recomposition-reconstitution qui les fusionne.

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Ensuite, chacune des pièces écrites et jouées dans le passé, comportent des passages qui décrivent avec minutie ce qui va arriver dans le futur.  Mishà, ne trouvant pas ses mots, utilise ces fragments fictionnels, mélangés aux poèmes déchirés, envoyés par les dictaphones, pour raconter avec les mots et les sonorités du passé, l'histoire du triple choc, rupture-agression-coma.

Echos décrivait en effet l’agression et la traversée du tunnel (Voyage galactique, tableau 11), la rencontre avec la mort (La Mort Tableau 13), l’enfermement de son ami Anth (Cabine, Tableau 16) et l’espoir en l’amour (Final, tableau 48). Ces scènes qui ont été jouées quarante fois entre 2006 (Echos I) et 2008 (Echos II) devant des spectateurs-témoins, décrivent, avec précision, ce que leur auteur, acteur, metteur en scène, vivra dans la réalité, six ans plus tard.

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De même, Koma (1.2.3), produite et jouée entre 2009 et 2011, est une création qui décrit comment les mots et le langage circulent dans la tête pendant les premières phases du coma.

Dans la pièce Kantik Opéra I, jouée en 2000 par Mickaël Sabbah, il était déjà question de rupture, d'infirmité amoureuse et de l'incapacité d'aimer dans un monde en déliquescence.

Enfin Daisymoon, écrite en 2010, montre comment deux personnages jouent avec les mots et leurs sonorités pour jouer à cache-cache avec la mort et échapper à leur échéance matérielle. Elle oppose la vengeance à la justice des hommes, une question qui se posera pour Mishà quelques années plus tard :  après avoir reconnu cinq de ses dix agresseurs, ces derniers seront relaxés par la justice.  

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À ces écrits personnels à plus d’un titre, s’ajoutent des extraits littéraires de La Divine Comédie de Dante,  et critiques de Proust dixit ? Réceptions de 'La Recherche' dans l'autofiction de Serge Doubrovsky, Carmen Martín Gaite et Walter Siti de Claudia Jacobi. Des fragments de recherches scientifiques sont aussi inclus, dont des passages des essais des Professeurs en psychiatrie Bruno Millet (spécialiste des agressions criminelles et des psychotropes) et Alain Brunet (spécialiste des chocs post-traumatiques). Des citations de Les Loges de la Folie sont aussi présentes.

 

On retrouve également des citations issues de fragments médicaux, ceux des services de réanimation, ainsi que des extraits des rapports psychologiques : rapport des psychiatres et psychologues. De même, des citations des procès verbaux du tribunal correctionnel de grande instance et de la police procès verbal d'enquête du dossier pénal sont présents (créant une véritable docu-fiction). 

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Ces fragments de textes, poétiques, théâtraux, judiciaires, juridiques, scientifiques, sont piochés sur le plateau de façon aléatoire. Mélangés à la musique, ils se répondent entre eux et aux sons qui répondent eux même au sens. Ils fusionnent et provoquent des coïncidences, des incidences, des connivences, des accidents, des néologismes et des homophonies. Cette matière sonore est enregistrée, puis mise en texte.
Cela donne les didascalies Post Electroshock Beat. Elles sont dites par dessus les morceaux enregistrés de la trame sonore. Les « mastercut », ainsi que tous les instruments cités plus haut sont utilisés parcimonieusement et de manière improvisée sur le fonds des pièces enregistrées pour jouer à nouveau avec les connivences et les homophonies. 

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SCÉNOGRAPHIE

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Le mur modulable de fond de scène pourra être démonté de façon à créer des écrans et sous écran, des parois en relief sur lesquelles seront projetées les images et vidéos, de même qu’au sol et au plafond. L’espace scénique sera neutre, agrémenté de ligne et formes géométriques. Les couleurs, le dynamisme seront apportés par les projections. Seront projetées des vidéos et des images de paysages et de l’espace, des œuvres d’art visuel .… mêlés à des éléments de bioluminescence.
En somme, la scénographie et la mise en scène donneront l’impression d’un vaste répertoire d’images, de sons et de textes, représentant des références partagées collectivement. Ce magma d’informations s’inspire des lieux de stockage de la mémoire mondiale comme le gratte-ciel Titanpointe de New York, où transitent des milliers de télécommunications.

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L’idée est également que ces vidéos et la façon dont elles sont juxtaposées dans un cocon, recréent ce qui peut se produire dans la boîte crânienne du monde, rendue visible par le coma.

Si chaque “saison” dispose de son identité visuelle propre, toutes rendent l’idées d’une traversée. Des effets 3D pourront être inclus afin d’aller plus loin dans une scénographie immersive.

 

Le sol de la scène sera recouvert de sable et d’une accumulation d’objets divers, organiques, mécaniques, musicaux, médicaux.

En outre, l’acteur pourra être placé sur un mécanisme reproduisant l’idée d’un «tapis volant», lévitant au dessus du sol. Enfin, l’acteur pourra s'asseoir presque au sein du public. Il pourra donc alterner entre trois espaces scéniques symbolisant les trois étapes de l’odyssée.

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